Harkis : il y a quarante ans, la grande révolte des camps...

29/07/2015 03:28

L'année 2015 marque le quarantième anniversaire de la grande révolte des harkis. Au début du mois de mai 1975, après 13 années internement dans les camps de Bias et de Saint-Maurice l'Ardoise, les familles de harkis se sont mobilisées et se sont révoltées contre la politique durable d'internement mise en œuvre depuis la fin de la Guerre d'Algérie dans le sud de la France.

Au début du mois de mai 1975, sous la houlette de M'Hamed LARADJI, le mouvement de révolte va s'installer au camp de Bias dans le Lot-et-Garonne et au camp de Saint-Maurice l'Ardoise dans le Gard. Prises d'otage et mouvements d'action ont rythmé quatre mois de révolte dans le sud de la France. La mobilisation des familles de harkis des camps dura jusqu'à la fin du mois d'août 1975.

Prenant la mesure de la situation critique et intenable dans laquelle les familles de harkis ont été plongées en France depuis la fin de la Guerre d'Algérie, le Président de la République Valery Giscard d'Estaing finit par annoncer au cours de l'été en conseil des ministres la fin de la politique des camps à l'égard des harkis et de leurs familles. Pour accompagner la fin de la politique des camps et leur fermeture, le ministre de l'Intérieur de l'époque, Michel PONIATOWSKY, dévoila le premier plan d'action en faveur des familles de harkis.

Au cours des événements de 1975, des figures de la communauté ont émergé. En premier lieu, M'Hamed LARADJI, le leader de la révolte, dont il convient de saluer la mémoire aujourd'hui. D'autres ont été des acteurs clés des événements de 1975. Sur ce point, il convient de reveler la personnalité d'Hocine LOUANCHI. Il fut un des révoltés de premier plan au camp de Saint-Maurice l'Ardoise en 1975.

Quarante ans après, le même Hocine LOUANCHI s'est engagé dans une démarche de mémoire en lien avec ces événements de 1975. Le 1er août prochain, il sera à l'initiative d'un rassemblement à Saint-Laurent des Arbres dans le Gard. Une occasion de se rappeler ce que furent les événements de 1975...

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Justice : 10 juillet 2014 : la Justice française condamne la politique d'internement des familles de harkis dans des camps !

Il aura fallu attendre 39 ans après les événements de 1975 pour que la Justice française condamne au nom du peuple français la politique d'internement des familles de harkis dans des camps dans le sud de la France. Le 10 juillet 2014, la Justice française à Cergy-Pontoise condamnait la politique des camps en ces termes : " il apparaît que très vite les familles des harkis ont connu des conditions de vie difficiles en raison notamment d'importantes contraintes matérielles ; que les différents témoignages concernant le camp de Bias décrivent tous une situation très dégradée ; qu'ainsi, l'ancien délégué interministériel aux rapatriés, Guy Forzy, souligne, plus généralement, que les camps d’accueil « sont des camps militaires très sévères avec un couvre-feu à 22 heures. Les enfants ne sont pas scolarisés dans les écoles du village » cité in « Rapport du conseil économique et social intitulé la situation sociale des enfants de Harkis » de Mme Hafida Chabi, 2007, p. 34 ; qu'en outre, l’administration contrôle également le courrier et les colis qui sont ouverts et que si des prestations sociales sont accordées aux familles, elles ne leur sont pas directement versées mais le ministère des rapatriés les réaffecte au financement de dépenses de fonctionnement des camps ; que les conditions de vie difficiles des familles installées au sein des camps ont également eu des conséquences sur l’état physique et moral des personnes ; qu'au regard de ce qui précède, ces faits n’étant au demeurant ni contestés ni contredits par les pièces du dossier, il est constant que le rapatriement des harkis qui s'est opéré dans l’urgence a conduit à des conditions d’accueil en France très dégradées, sans rapport avec les besoins et les attentes des familles ainsi qu'à de nombreuses restrictions à leurs libertés individuelles ; que si ces conditions de vie difficiles peuvent trouver une explication sur le court terme en raison de l'arrivée massive de rapatriés alors que les autorités françaises n'avaient pas planifié un tel flux migratoire et les problèmes de sécurité subséquents, une telle situation n’a pu se prolonger à moyen et long terme pendant plusieurs années sans considérer qu’il a ainsi été porté atteinte au principe du respect de la dignité humaine garanti notamment par la Déclaration des droits de l'homme et des citoyens et les stipulations de l’article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que cette situation est également constitutive de fautes engageant la responsabilité de l’Etat dès lors qu’elle révèle un manquement de l’Etat aux droits fondamentaux et libertés fondamentales issus tant des textes de droit interne que de droit international, ce qui est le cas de la liberté individuelle d’aller et venir protégée par les articles 2 et 7 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen du 26 août 1789 et par l’article 66 de la Constitution du 4 octobre 1958, du respect de la vie privée protégé par l’article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales et par l’article 9 du code civil, du secret des correspondances actuellement protégé par les articles L 3-2 et L 32-3 du code des postes et des télécommunications électroniques ; qu’au regard des conditions de la scolarité des enfants de harkis dans ces camps, le principe d’égal accès aux services publics de l’enseignement a été également méconnu ".

La réalité préjudiciable de la politique des camps est aujourd'hui reconnue. Après la reconnaissance, le temps de la réparation est maintenant venu. C'est pourquoi le sujet d'une future grande loi de réparation devrait être au coeur des débats du rassemblement du 1er août 2015 à Saint-Laurent des Arbres.

 

Dans la presse :

Objectif Gard :  Rassemblement des Harkis et Pieds Noirs à Saint Laurent des Arbres